Quel est le rôle d’un.e CEO, jour après jour ? Comment être certain qu’une entreprise va dans la bonne direction? Comment déléguer sans abdiquer ? Lancer sa boîte, c’est faire face à une multitude de questions et d’incertitudes.
Ce talk de Keith Rabois, ancien VP chez Linkedin et PayPal, et aujourd’hui partner d’un fonds d’investissement (Founders Fund) donne d’excellents conseils pour gérer une entreprise à la complexité croissante. Voici les points qui m’ont marqué.
Il est normal qu’au lancement d’une boîte tout paraisse confus et désordonné. C’est le résultat de cycles d’innovation rapides et d’une nécessaire créativité.
Pour s’en sortir, il est important de segmenter les problèmes entre les plus « froids » et ceux qui sont potentiellement fatals, pour se concentrer sur ces derniers. Ce n’est pas toujours facile de faire la différence, et l’enjeu est de parvenir à trier et prioriser.
Être CEO exige d'avoir des qualités similaires à celles d'un rédacteur ou d'une rédactrice en chef. Tout particulièrement :
1. Clarifier et simplifier : Initiatives, marketing, produits, … ; il faut simplifier au maximum.
2. Distribuer les ressources:
3. Cohérence et unité : gardez une cohérence de ton et de culture au sein de l’entreprise, une unité. Toute personne extérieure doit avoir le sentiment que tout n’est fait que par une même personne : site, produit, réponses sur le chat… C’est aussi ça, la construction d’une culture forte.
4. Déléguer : dans un journal, le rédacteur ou la rédactrice n’écrit pas la plupart des articles. Il en va de même pour le rôle de CEO : il/elle doit déléguer. Vous restez responsable de tout, et pourtant vous devez décentraliser la décision au maximum.
Keith Rabois propose ici deux concepts très intéressants pour apprendre à bien déléguer.
Ce concept a été défini par Andy Grove d’Intel (“High Output Management” ): il s’agit de se poser ces questions : est-ce que la personne a déjà fait cette tâche ? quel est son degré de maturité pour cette tâche ?
Naturellement, le degré d'autonomie découle du niveau de maturité.
Selon Keith Rabois, votre “style de management” doit être dicté par vos employés, au cas par cas. Le style doit s’adapter aux employés, et la décision de déléguer ou non doit elle aussi être adaptée au niveau de maturité de l’employé sur la tâche.
Il n’est pas aisé de déléguer des décisions dont l’enjeu est important. Le rôle du CEO est d’analyser le type de décisions à prendre, et de choisir de déléguer ou non. Il est possible de classer les décisions selon votre niveau de certitude et conviction, et du champ de conséquences.
Pour une décision à faible conséquence, et pour laquelle vous êtes peu convaincu de votre opinion, déléguez. Cela permet à votre équipe de gagner en autonomie, et d’apprendre très vite.
À l’inverse, pour une décision aux conséquences pouvant être dramatiques et pour laquelle vous avez la certitude d’avoir raison, c’est à vous de faire le choix et d’en prendre la responsabilité.
La meilleure façon de faire ça est de passer du temps à expliquer pourquoi vous faites ce choix. Il est facile de prendre des raccourcis, et de se dire que c’est clair. Si vous voulez que les gens grandissent : expliquez, expliquez, expliquez.
Disclaimer : bien que l’idée derrière cette métaphore soit pertinente, je ne suis pas parfaitement d’accord avec la comparaison d’un employé à une “ammunition” ou à un “barrel”. Pour la bonne compréhension du texte, nous la garderons telle quelle, mais n’hésitez pas à me proposer une meilleure formulation :)
Pour Keith Rabois, une entreprise regroupe en majorité des “ammunitions”, des “munitions”. Quelques uns de ses membres sortent du lot : les “barrels”, ou “canons”. C’est eux dont l’entreprise a surtout besoin. Qu’est ce qu’un “barrel”? Un “barrel” est capable de prendre en charge une idée depuis sa conception jusqu’à sa réalisation, tout en emmenant des personnes avec lui.
Ils sont difficiles à trouver, et presque irremplaçables car très spécifiques à la culture de votre entreprise. Quand vous en avez un, prenez en particulièrement soin.
Trouver le niveau de responsabilité adéquat est également essentiel. Nous avons tous un niveau maximal de problèmes qu’on peut résoudre. C’est au CEO de pousser le niveau de responsabilité de son équipe jusqu'à trouver la limite.
Un « A+ problem » est un problème qui a un fort impact sur l’entreprise, et qui est difficile à résoudre, qu’on ne sait pas encore résoudre.
La plupart des gens vont se concentrer sur des problèmes qu’ils savent résoudre, les « B+ problems », et procrastiner pour résoudre les problèmes plus compliqués. En ne résolvant que des « B+ problems », votre entreprise va croître, gagner de la valeur, mais vous n’aurez jamais l’idée majeure et différenciante, celle qui est risquée, celle qui vous permettra de créer quelque chose d’unique.
Il faut se concentrer sur un problème A+ à la fois.
La transparence est nécessaire au succès d’une entreprise. C’est ce qui permet que chaque employé se sente concerné par les décisions, comme si c’était sa propre boite. Keith Rabois décrit cette transparence à plusieurs échelles (assez similaire à ce que nous faisons chez Alan) :
C’est un concept particulièrement important : si on mesure un seul paramètre, l’entreprise va tendre à l’optimiser, parfois au détriment d’autres paramètres importants. Il est donc nécessaire de les coupler pour les optimiser.
Par exemple, si vous cherchez à diminuer le taux de fraude, il y a de fortes probabilités que vous réduisiez aussi la satisfaction client. Il faut donc mesurer en même temps le taux de fraude, et la satisfaction client. Cela sera un moteur d’innovation.
Le dernier sujet abordé est l’importance des détails. Dans son livre intitulé The Score takes care of itself, Bill Walsh explique que si tous les détails sont maîtrisés, il n’est plus utile de se focaliser sur comment faire pour avoir un milliard d’utilisateurs ou un milliard de dollars en revenu. Cela ne sera que le résultat de vos efforts pour parfaire chaque détail.
Il n’existe pas une façon unique, modèle pour créer une entreprise qui fonctionne bien. La métaphore très pertinente, employée par Keith Rabois, qui compare le rôle de CEO à un celui d'"éditeur", met l’emphase sur ce qui me paraît essentiel : la confiance (et donc pouvoir déléguer), la transparence, et la prise de risque. Trois points qui sont des piliers de la culture Alan.